• Laisser une trace

    au moins de consolation

    dans tout recoin sali.

    Refuser

    la moindre défaite de l’amour.

    Échapper aux déferlantes,

    à l’oubli de nous-mêmes.

    Se réfugier,

    c’est-à-dire s’élever,

    dans le ciel qui nous unit.

    S’emporter,

    de la violence qui nous arrache des sables.

    Nous retrouver, là,

    stables,

    décidés,

    amoureux de la terre.

     

    Le soleil resplendit

    sur ce territoire battu par les tempêtes.

    Nous sommes étonnés de voir

    l'ouragan de plus en plus faire rage,

    le soleil de plus en plus

    donner sa chaleur.

    Nous sombrons, conscients,

    plus visiblement de jour en jour.

    Plus nous nous enfonçons,

    plus éclatante est la lumière

    des rayons qui nous atteignent.

    Nous sommes captifs d’un corps à corps,

    en voie d’être vaincus,

    avec un pressentiment

    de splendeur.

     

    Une nuée,

    toute douceur et lumière,

    s’étend sur le marécage,

    d’un mouvement amoureux,

    comme pour le protéger

    et le glorifier.

    Une violence,

    toute compassion et beauté,

    étreint le voyageur,

    d’un geste de passion,

    comme pour l’abattre

    et l’exalter.

     

    La joie de l’arbre seul.

    Il voudrait,

    depuis l’extrémité de ses racines

    jusqu’à la pointe de ses plus hautes feuilles,

    être de la forêt,

    comme il est naturel pour un arbre.

    Mais, sur ce territoire,

    il a été planté dans le désert.

    Dans sa sève,

    il demeure sans correspondance.

    Une blessure invisible est sa marque.

    De toute son énergie, et de sa persistance,

    il s’y installe, jusqu’à la traverser.

    On le voit fleurir,

    comme jamais aucun autre avant lui.

    Il s’abandonne à sa nature,

    correspond à la solitude.

    Sans être apparent, se produit un échange.

    Tandis qu’il s’épanouit,

    vient dans sa sève se bercer la forêt.

     

    Demeurons dans l’intimité,

    cette région née des orages

    et des arrachements.

    La voici soudain qui fleurit,

    en un bouquet de confiance

    sans réserve,

    en une joie

    débordante de fidélité,

    en un présent

    que les peurs n’ébranlent pas.

    L’intimité,

    ce climat sous les auspices duquel

    tant de liens se tissent

    au dehors.

     

    Contemplation,

    dans le silence,

    dans la vallée où se repose le soleil.

    Nous sommes délestés de tout projet,

    dispensés des souvenirs.

    Au sein du présent, nous vivons.

    Ne dépendant de personne,

    nous rejoignons

    celui-qui-est-ici

    dans son jardin de détente.

    Parce que nous sommes

    ceux de la rupture,

    la vallée

    resplendit de douceur.

     

    La douceur est passée à l’attaque.

    Émanant du soleil,

    devenue comme semblable à lui,

    elle est sortie de la vallée,

    a laissé se dissoudre

    d’hésitants nuages,

    s’est orientée

    vers ceux-qui-ne-sont-pas-connus.

    Saveur d’aventure,

    mais de celle que porte

    l’intimité.

    Par son mystère,

    nous demeurons dans la vallée,

    où nous invitons à se reposer

    une multitude.

     

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  • Liberté,

    domaine des renoncements,

    où règne la pleine rencontre des hommes.

    Terre inconnue,

    que nous abordons par le repos,

    ayant laissé derrière

    les miettes inassouvies

    d’un monde dispersé.

    Nous voici,

    debout et paisibles,

    à l’orée d’un chant qui nous emmène…

     

     

    Étape au sol rugueux.

    Dès le commencement,

    les aspérités du chemin

    donnent le sens.

    Étonnante sécheresse

    rafraîchissante.

    Nous négocions ce virage

    et, vidés de nos colères,

    enfilons une ligne droite.

    Un souffle délassant

    nous accompagne.

     

     

    L’air de ce pays nous porte,

    depuis le chant de l’éveil

    jusqu’aux multiples harmonies du soir.

    Nous traversons

    le parler vrai et ses audaces,

    l’être là et ses silences,

    le donner et son embrasement.

    Un semblant d’impureté,

    loin de vicier l’air,

    le rend,

    dans un rayon de soleil,

    à chaque instant,

    limpide.

     

     

    De gestes menés jusqu’au bout,

    d’aspirations délaissées,

    de volontés accomplies,

    de rencontre comblée,

    le voyage se poursuit,

    dirigé d’ailleurs plus que d’ici.

    Une pensée claire

    s’établit peu à peu

    dans un renouvellement

    incessant.

    Elle recueille

    les intempéries.

     

     

    La journée était belle,

    jusqu’au bout,

    avec son bouquet final,

    de cadeaux sans cesse

    de l’un à l’autre donnés.

    Chaleur, même en saison froide,

    nuit étoilée, pleine lune.

    Je me retire,

    dans le cœur aimant de la nature.

    Soudain, l’orage.

    Au fond de l’intimité.

    Où cela ne se produit jamais.

    Tombant, dirait-on, de la beauté même.

    Qui, à peine contemplée, ne se voit plus.

    Et moi, détruit par la tempête.

    Ou saisi par l’éclair.

    Emporté.

    Dans un tourbillon de joie à n’en plus finir.

     

     

    La fête s’installe,

    et les couronnes.

    Pays de gloire

    et de stabilité,

    royaume de bonheur

    et de multiplicité.

    Tout serait vain

    sans l’écarté,

    lui qui soutient

    ce cœur en liesse.

    Je m’en éloigne,

    et combien je l’aime !

    Mystère d’une distance

    qui a pour nom

    intimité.

     

    Dans le cœur

    prévalent de nombreuses morts.

    Leurs sentiers, suivis jusqu’au bout,

    découvrent

    une clairière rayonnante.

    Des milliers de lignes de lumières

    s’élèvent, reviennent,

    s’élèvent à nouveau,

    leurs nuances toujours différentes.

    Nous sommes chez nous,

    avec un désir irrésistible

    de retourner dans la ville,

    pour y vivre.
     


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  • Lumière,

    qui ne nous appartient pas

    et vient du seul instant

    que son origine, et la nôtre,

    nous donne.

     

     

    Couleurs,

    dont la multitude

    a rempli nos journées

    de nuances, et d’éclat,

    pour s’abîmer,

    ou s’exalter,

    dans la teinte nocturne

    de notre palette commune.

     

     

    Plaisir,

    d’être ensemble,

    comme un surcroît de journée,

    qui anticipe le repos,

    voire le remplace,

    et d’où jaillit,

    renouvelée,

    la clarté du poème.

     

     

    Délassement,

    lâcher de tensions,

    qui laisse s’envoler

    nos exagérations

    et leur cortège de querelles,

    et nous prie, ensemble,

    de regarder

    se bâtir notre œuvre.

     

     

    Pauvreté,

    resplendissante,

    sans défense,

    en vérité puissante,

    seule

    à être reçue par tous,

    porte

    de notre jardin.

     

     

    Résurgence,

    de toutes nos eaux cachées,

    fidèles,

    aux flots incessants,

    sourire

    de tous les désirs oubliés,

    retrouvés,

    depuis toujours comblés.

     

     

    Douceur,

    qui est force

    à cause de la clarté,

    mère

    par le pouvoir de notre pacte,

    unité

    en vertu de son effacement,

    et rayonne !

     

     

    Abandon,

    qui par surprise

    et constance

    fait de nous une seule chair,

    qui traverse le désert

    et le laisse fleurir,

    partout,

    dans une danse immortelle

    où se connaissent

    toutes les créatures.

     

     

    Liberté,

    ou désolation,

    dans le comble des absences

    présence comme d’une mère,

    le temps attendu

    est remis à plus tard,

    mais la tendresse à venir

    est déjà là,

    compagne de l’homme,

    à jamais,

    dans le sein lumineux

    de la mort.

     

     

    Demande,

    sans prétention,

    que nous tiendrons ensemble

    dans nos mains,

    que nous demeurions

    destitués,

    en compagnie,

    renouvelée chaque instant,

    d’une princesse

    évincée.

     

     

    Retour,

    après une journée brillante,

    chez la princesse,

    dans sa demeure nocturne,

    où elle garde,

    amoureusement,

    les perles détachées de l’univers.

     

     

    Poème,

    comme une absence

    qui par son silence

    reçoit sur sa portée

    les notes,

    uniques,

    de nos mélodies d’aujourd’hui.

     

     

    Constance,

    qui se tient

    à distance

    pour posséder

    l’absence.

     

     

    Retraite,

    dans notre désert,

    avec son visage,

    sa solitude

    qui embrasse les peuples,

    son regard

    d’espoir qui étreint le désespoir,

    sa tendresse

    qui berce

    notre œuvre et sa beauté.

     

     

    Départ,

    disparition,

    vide

    qui devient compagnie,

    surprise

    qui se fait présence,

    néant

    demeure

    de l’un en l’autre.

     

     

    Incapacité,

    état de pesanteur,

    porte peut-être qui se ferme

    et pourtant, avec délicatesse,

    poussée vers l’intérieur,

    se rouvre,

    laisse

    entrer la clarté

    et resplendir

    notre maison.

     

     

    Cadeau,

    poème offert

    loin de son origine,

    s’en vont nos paroles et nos fêtes,

    s’ouvre notre entretien

    sur l’inconnu,

    s’ébauchent les fondations

    de notre demeure publique.

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  • Repos,

    qui nous élève

    et nous rapproche,

    air marin,

    renaissance de notre avenir,

    touche délicate

    sur les fatigues de la terre.

     

     

    Souffle,

    qui en créant un visage nouveau

    évoque

    dans la lumière

    les acteurs du passé, ou leurs gestes,

    et les rend efficaces

    maintenant.

     

     

    Sommeil,

    qui à la fois se donne,

    couronnement de nos fatigues,

    et nous prend,

    tous nos talents perdus,

    dans son domaine

    où survit,

    seule,

    la rencontre de nos cœurs.

     

     

    Décision,

    ferme, immédiate,

    qui des images captivantes

    se libère

    et retrouve

    dans un espace réel

    le temps infini

    de notre mémoire.

     

     

    Confidence,

    qui donnée à sa juste place

    fait resplendir

    l’intimité

    et l’étend,

    par la présence qui la remplit,

    jusques aux confins de l’univers.

     

     

    Harmonie,

    qui ne se contente pas de son confort

    mais sort,

    et s’en va

    vers la guerre,

    la prend dans ses bras,

    demande pardon pour elle,

    meurt à sa place,

    découvre

    des peuples qui se donnent.

     

     

    Patience,

    inévitable fruit de relation,

    qui même dans la solitude

    porte notre fidélité

    jusqu’à sa nuit

    infiniment heureuse.

     

     

    Enfance,

    qui rafraîchit la sagesse,

    accroît sa liberté,

    la relie à toutes les générations

    et, à travers l’endurance,

    confirme

    l’origine commune de notre création.

     

     

    Résistance,

    qui ne vient pas de la force

    mais de l’abandon à notre origine,

    au souffle qui nous porte

    et demeure à chaque instant

    plus grand,

    encore plus grand.

     

     

    Astuce,

    avec le parfum de ta liberté,

    qui délaisse,

    paisiblement,

    la division

    et se tourne,

    allègrement,

    vers des oasis

    qui désaltèrent nos pensées.

     

     

    Fragilité,

    éveil de conscience,

    qui montre de nos liens

    la justice,

    cette pauvreté

    écrin de grandeur.

     

     

    Dispersion,

    comme d’une armée indisciplinée,

    éloignements qui m’écartèlent,

    infidélités

    qui me vident

    et à la fois,

    par la délicatesse

    qui nous tient,

    donnent à notre cœur

    les dimensions, autrement insaisissables,

    de l’humanité.

     

     

    Poésie,

    dont la persistance

    manifeste notre existence

    et qui seule demeure

    lorsque, à bout de forces,

    nos vides

    s’appellent.

     

     

    Étau,

    dérivé de division,

    qui me prend la tête,

    et que soudain je saisis

    à pleines mains

    et qui se révèle

    portail grand ouvert

    de notre domaine.

     

     

    Attente,

    dont chaque minute

    me comble,

    comme si le moindre cadeau

    reçu

    était de notre temps

    l’accomplissement.

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  • ...où le poète, en passant par un "toi" intime, accueille en lui "des peuples qui se donnent" "dans une danse immortelle où se connaissent toutes les créatures"...

    Beauté sensible et palpable,

    qui comble mes yeux,

    et me fait

    vouloir la quitter

    afin que je devienne,

    avec toi,

    parcelle de beauté,

    danse de l’éternité.

     

    Silence,

    qui par-dessus la révolte

     peu à peu se reçoit,

    et se révèle,

     dans son ampleur

    et par le renoncement,

     ta demeure, et la mienne,

    ouverte. 

     

    Attente,

    perle précieuse du temps

     et de l’esprit qui en moi s’étend,

    champ à perte de vue,

     notre domaine,

    que nous parcourons, tranquilles,

     en allumant des feux,

    partout. 

     

    Détournement

    de tout notre corps.

     Lancés sur une voie rapide,

    la volonté laissée loin derrière,

     nous débouchons dans un espace

    d’enfance

     où ce qui nous manque

    creuse nos fondations. 

     

    Douceur,

    qui dans mon corps,

     par l’obéissance amoureuse,

    anéantit la violence

     et nous met,

    dans notre silence,

     à la disposition du tout autre.

     

    Retraite en notre demeure

    qui, à la tombée de la nuit,

     nous attire

    par son secret

     et recueille

    posément

     de nos rencontres

    le souffle irrépressible. 

     

    Bavardage,

    simple, enjoué,

     étonnamment beau,

    dont nous fîmes la répétition

     et qui, par le détachement,

    par l’adhésion au moindre étranger,

     devient, intimement,

    spectacle grandiose,

     parole qui fonde.

     

    Enthousiasme,

    pointe avancée de l’humanité,

     qui s’enfonce dans notre sol

    et requiert,

     par nature,

    l’instant de repos,

     pour s’accomplir.

     

    Générosité,

    enracinée dans notre constance,

     qui se réjouit de toute perte

    et renverse chaque frontière,

     mère désolée de liberté

    et de quiconque gêne son essor,

     mémoire conquise

    de l’harmonie. 

     

    Malaise,

    visage de présence au pied de la terre,

     regret,

    dette qui exige que je m’en acquitte,

     carence,

    misère qui s’enroule autour de ma tête,

     constance,

    qui laisse la lumière

     se loger ailleurs.

     

    Rayonnement

    d’un corps créature

     qui à l’instant de son donner

    et par son être multiple

     a le parfum du créateur

    et l’exhale. 

     

    Humour,

    qui d’un coup d’œil et d’oubli

     balaie les mesquineries,

    recrée le corps,

     s’ouvre,

    dans l’échec,

     à un ciel amoureux

    de nos misères comme de nos triomphes. 

     

    Fureur,

    qui saisit le corps isolé

     et le ferait exploser

    si en elle ne se montrait pas

     un autre corps,

    abîmé par la colère dont il est amoureux,

     et qui, dans la paix restaurée,

    me prie

     de lui parler

    de toi. 

     

    Faiblesse,

    qui dans l’incertitude

     donne joie,

    lieu sensible

    où notre existence,

    unie,

     étincelle.

     

    Renoncement,

    qui fait cadeau de nos succès

     à la pauvreté

    et lui rend

    son rôle d’auteur

    dans les poèmes quotidiens

     de notre étonnement.

     

    Force,

    sous couvert de discrétion,

     qui s’approche,

    parmi les agresseurs,

    et suggère sa préférence

    non du désespoir

     mais de la beauté.

     

    Remerciement,

    qui donne

     de toute urgence

    ce qui est reçu,

     et celui qui reçoit,

    afin que dans la joie

     demeure seulement

    le bannissement qui nous unit. 

     

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