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De la rose au baiser
De la rose au baiser
CHAOS
Une femme.
La fille l’épouse la mère.
L’une de nous.
Se donne.
Intelligence éprise de différence,
rose rouge offerte à tous les êtres,
entière pour chacun.
***
Libres.
Un pacte les distingue !
Dans le sein de la mère
ils sont.
Éternité.
Baiser qui se pose
sur les lèvres du monde.
***
L’épouse comprend.
Dans sa pensée
ils sont
séparés.
Jamais aussi proches.
Graine enfouie
qui bonifie sa terre.
***
La fille écoute.
Voix soudaine
lui demande
tout.
Elle adhère.
Feuille légère
soulevée par le vent.
***
Nous, ordinaires,
reçus
à la pointe d’un accord.
Est-ce
la formation d’un corps ?
Crème fondante
sur le bout de ma langue.
***
Intelligence :
l’inattendue dans le corps.
Offrande fine.
Amoureuse explication
qui avec assurance déroule son fil.
Poussière d’or
versée dans nos mains.
***
Différence :
parure précieuse
de l’unité,
arrangée
par la sagesse.
Nappe damassée
sur une table servie.
***
SÉPARATION
La création
dans sa finesse extrême
se donne
à une forme humble
de la parole.
Terre
qui se sépare des eaux.
***
La création
en vue de son fruit
se donne
en tout temps
à son créateur.
Terre
au moment de sa beauté.
***
La création
à l’incréé
se donne
reconnue
comme son appelée.
Terre
en suprême liberté.
***
La création
une
se donne
en attente
à l’époux.
Terre
d’une infinie dignité.
***
La création
informe
se donne
à un jour
mis de côté.
Terre
de la distincte lumière.
***
La création
du fond des mers
se donne
à un vent
turbulent.
Terre
des espèces animées.
***
La création
dans son pouvoir
se donne
humanité
à sa ressemblance.
Terre
de la féconde semence.
***
HUMANITÉ
Lorsque se consume l’amoureuse clarté de la création,
sans réserve se livrent de l’un à l’autre les êtres humains.
Ils sont de la solitude et de la rencontre les interprètes,
du jeu de la terre ainsi poursuivi les perdants et les gagnants.
Exposés à la défaite, ils affluent sur le lieu de l’élection,
vainqueurs ils se haussent au niveau de la compagnie des perdants.
Ils sont les créatures qui portent le créé et l’incréé.
***
La nature de tout cœur se libère de ce qu’elle chérit
et le laisse ou le porte au sommet de son art ou de sa passion.
Imprégnée de lumière elle s’abandonne à une autre saison
qui ardente l’invite à déceler ses couleurs et ses parfums.
L’objet de son amour, livré à une pensée imprévisible,
distille debout la substance du paysage contemplé,
œuvre d’art détachée, plus que jamais sœur voulue de la nature.
***
Un peuple convié se livre à la parole accordée par un autre
et dans son amitié reçoit la connaissance de ses désirs.
Naissance annoncée, naissance assumée, ton vouloir sera le mien,
ton ardeur sera la mienne, sans que nos cultures se confondent.
L’étreinte grandit, apprenant à chacun les raisons l’un de l’autre
au point que leurs natures jointes se pénètrent et se démêlent
formant une nation à même de changer le feu en histoire.
***
L’instant désert s’établit sur un plan étroit et indifférent.
Il se tient seul comme si la durée n’avait plus droit d’exister.
Il rebondit dans un creux comme une pensée livrée au non-sens.
Brumeux comme un commencement confus comme un aboutissement
il est choix dévorant d’abandon de soumission d’aveuglement.
Caution d’anéantissement il est sans saveur et sans odeur.
Saisi dans sa parfaite insignifiance il prodigue ses faveurs.
***
Le mutisme qui brise les rapports est le rocher à sculpter
la haine tenace qui roule sur les cous est l’arbre à planter
la rechute qui écrabouille est l’épouvantail à embrasser
la division qui mutile les peuples est le vide où plonger
la mort que les siècles traversent est le tunnel où s’enfoncer
la déréliction que le créateur souffre est la nuit à choyer
pour rejoindre livrée à la lumière la liberté du cœur.
***
Les peuples, de retour de la défaite, tête basse, supplient
la tendresse de leur accorder le pardon qui bâtit le corps,
le mystère qui reconstitue la chair lors de toute débâcle,
le flux qui la livre désemparée à la liberté présente.
Comment donc des abîmes seulement peuvent-ils en être mère ?
Comment donc seul l’anéantissement la rend-elle débordante ?
Quelle est cette liberté que seule connaît désolée tendresse ?
***
De la rose au baiser, par la graine à la feuille, de crème ou d’or,
la nappe est mise. Légère, la table nous reçoit, livrés au
banquet que la maîtresse de maison a imaginé pour nous
tous, autant que nous sommes, nés de l’obscurité par la lueur
douce et forte qui baigne une ville dont les fondations labourent
la terre désormais splendide par ses crevasses. Leur aspect
répugnant éclaire un corps en liberté qui dans la joie se dresse.
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Commentaires
http://betty-harmony.eklablog.com/ Des mots prenants , merci , à bientôt de te relire ,betty