• Carnet de route 5

     

    Le soleil!

    Après cet entretien,

    il se mit à resplendir,

    répandant sur la terre entière

    un feu

    désaltérant.

    Et l’eau de contradiction

    conduisit

    dans l’instant

    le voyageur parmi ses compagnons.

    Leurs regards se tournaient

    au près comme au loin.

    Leurs pensées,

    amantes de l’ombre,

    ouvraient au soleil,

    par leurs exigences et leurs renoncements,

    des espaces inouïs.

    On eût dit une semence

    qui portait des peuples... 

     

    La compagnie, pourtant ensoleillée,

    fut effleurée

    par l’inutilité.

    Un instant, disparut le goût de la parole,

    qui, elle, se tint debout,

    et nous éleva.

    Nous voici,

    replongés dans le bassin du rendez-vous.

    Nous y apportons

    les égarements du jour

    et notre fidélité.

    Dans cet air que nous respirons,

    parfaitement distincts, nous sommes,

    en vertu de ce recueillement,

    unis.

    Moment que nous protégeons,

    et qui s’ouvre

    aux mille compagnons.

     

    Nous nous promenons

    dans un instant immense,

    où nous avons le temps

    de polir notre œuvre.

    Dans cette liberté

    à laquelle nous appartenons,

    comme dans un calice

    viennent

    s’absorber et se déployer

    les amants de la beauté.

    Notre inexistence émerveillée

    les reçoit.

    Ils versent en nous,

    comme un nectar,

    leur humanité.

     

    Poursuivre notre chemin,

    dans cet espace qui s’éloigne du monde,

    et qui l’attire à soi.

    Laisser tomber la volonté,

    dans cette atmosphère qui l’ignore,

    et qui l’exauce.

    Abandonner le sentiment

    à l’envol,

    et voir la terre telle qu’elle est.

    Quelle est cette liberté

    qui nous donne les êtres

    dans leurs souffrances et leurs rêves,

    dans leurs pouvoirs blessés,

    dans leur assurance sur la mort ?

    La vie nous inonde,

    hommes et femmes se frayent un chemin

    dans notre espace.

     

    Telle une palmeraie,

    et la source en son cœur,

    la sérénité

    a reçu la journée

    d’un bout à l’autre.

    Douceur,

    offerte à la durée.

    Rémission,

    déposée dans la besogne.

    Facilité,

    surgie de la détresse.

    Une surprise venue de loin

    a répandu son parfum

    sur toutes les terres

    de notre espérance.

     

    Voici

    un espace

    qui oublie

    et recueille

    tous les pays parcourus.

    Illimité,

    captif d’un envol,

    continuellement plus loin.

    Le voyageur est sans repère

    mais chez lui

    dans cette distance en mouvement

    qui l’expulse de tout

    et lui donne,

    reconnaissable,

    la moindre pierre de chaque trajet.

     

    Laissant se diffuser

    l’espace

    au sein duquel nous vivons,

    nous contemplons

    une effusion de lumière.

    Les hommes

    reconnaissent

    leur exigence

    et celle qui les engendre.

    Ils dominent,

    tels des enfants tranquilles

    dans les bras de leur père.

    Le monde explose,

    en une foule

    dont chacun se connaît

    dans le cœur

    de l’autre.

     

    Noter, en cours de route,

    ce tronçon nouveau sur lequel nous entrons,

    au sol rugueux,

    et de contemplation facile,

    attrayante, exigeante,

    fascinante.

    Quelles sont ces pierres,

    pareilles aux recoins de nos cœurs ?

    D’un seul regard

    les polir,

    et elles viennent occuper leur place

    dans notre paysage.

    Quelqu’un est là,

    en face ou au dedans,

    qui donne la douceur

    à nos aspérités.

     

    Explosion de beauté,

    et de grandeur,

    commence,

    en miettes pures,

    le couronnement de l’humanité.

    De tous côtés rejaillit

    la lumière

    qui vient enfoncer les portes encore fermées

    de nos passés.

    Tout est possible,

    si notre regard reste cloué

    à ce vide inachevé

    d’où l’univers se lève.

    Sur la ligne de l’horizon, trouble et brisée,

    homme et femme

    son sommet

    se dessine.

     

    La route se peuple de milliers de lueurs.

    Chaque visage

    est l’objet de ma quête.

    Il me rend,

    en clair,

    la splendeur de son père.

    Mes yeux sont plongés

    dans l’entrevue de ce moment,

    sans attente, mais étonnés,

    bouleversés

    par ce portrait vivant de nos origines.

    Et lorsqu’un regard se détourne,

    il m’appelle, absolument,

    et dans mon donner

    manifeste une intimité

    qui distille

    délicatesse.

     

    L’heure du refus.

    La beauté élevée de terre.

    Aborder le néant,

    et se laisser emporter par lui.

    Lorsque le cœur de notre cœur est touché,

    comment refuser le refus ?

    Ce couteau qui nous pénètre

    donne le sens de l’existence.

    L’on aperçoit

    l’éternité.

    Nous ne voudrions pour rien au monde

    quitter ce compagnon.

    La tristesse, en s’étendant,

    cède la place à la création.

    L’auteur du refus

    nous apporte, avec finesse,

    le cadeau que nous attendions.

    Il y a de la beauté dans l’air.

     

    Soudain, en face, jaillit la lumière.

    Nous l’avions aimée,

    présentée,

    donnée.

    Perdue.

    Nous ne savions plus si elle était encore.

    Nous n’en avions même plus le souci.

    En notre esprit,

    peut-être par ce secret

    qui veut sans cesse être manifeste

    et ainsi consolide la patience,

    ne régnait plus que la confiance,

    et l’abandon, tranquille.

    Dans cette place libre,

    soudain de sa source naturelle

    vient se poser la lumière,

    identique, et plus franche que jamais.

    Telle la création,

    lâchée par le créateur.

     

    Et la lumière

    nous bouscule,

    nous appelle,

    loin des colères et des désespoirs,

    par delà les rejets et les révoltes,

    dans cet espace élevé

    qu’elle occupe parmi nous.

    Et lorsque s’infiltre

    la possession des êtres, qui nous divise,

    elle recommence, pour nous sauver,

    à briller de plus belle

    dans la liberté qui nous unit.

    Et elle me demande,

    humble,

    de t’adresser la parole.

    Au cours de cet entretien

    en son sein,

    nous la contemplons

    et retrouvons

    la beauté vulnérable de chaque visage.

     

    Voici un passage, aux approches d’un col,

    où le climat devient doux,

    et l’ascension aisée.

    Prendrons-nous ces instants comme un cadeau ?

    Oui, car le soleil les baigne

    et ils nous poussent en avant.

    Mais nous ne saurions les conserver.

    Ils ne sont pas de notre temps,

    qui pressent l’avenir.

    Les minutes de ta parole

    me détachent

    pour l’éternité.

    Nous voici,

    au sommet,

    contemplant la vaste plaine,

    au cœur de ce pays

    dont les peuples se rassemblent

    sous un ciel infini

    qui s’abaisse, et nous élève.

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  • Commentaires

    1
    Samedi 13 Mai 2017 à 15:48

    J'ai lu quelques uns de vos poèmes , je suis charmée de par leur justesse

    Au plaisir de se lire mutuellement...Betty...Harmony

      • Mardi 16 Mai 2017 à 17:14

        Merci de votre message. Cela m'a donné envie de rendre visite à votre blog... J'ai bien aimé les poèmes que j'ai pu y lire. Il y a souvent au delà de vos mots des univers tout à fait réels, du domaine de l'invisible, qui donnent de la consistance à ce que vous rêvez et concevez. Si je devais me souvenir d'un seul de vos textes, je crois bien que ce serait celui sur Alice...

    2
    Mardi 16 Mai 2017 à 17:54

    Merci Jean-Paul , je vous mets dans mes liens , venir vous lire de temps en temps sera un plaisir ....A bientôt

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