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Par Jean-Paul Teyssier le 1 Juin 2022 à 15:13
Le corps fatigué : le sujet du poème.
Comme si le marbre
se désagrégeait,
comme si le sculpteur nommait
la poussière.
Comme si les mots de celui qui tient le crayon
s’éloignaient
ne correspondaient pas aux couleurs
refusaient l’expression
s’enfermaient dans un bloc de pierre,
fuyaient à l’intérieur.
Lui-même,
celui par lequel les mots semblent passer,
ne se connaît pas.
Son intérieur est espace de fuite,
mais il n’y trouve ni place ni tunnel.
Seuls quelques mots
vidés de sens
entrevoient
des morceaux qui s’écroulent
des silhouettes qui se taisent
des observateurs qui n’observent rien.
Lorsqu’un mot se présente
on l’oublie.
Chez celui qui semble lire
comme chez celui qui semble écrire
une mémoire morte.
Rien à rappeler,
rien à développer.
Que me soufflais-tu donc
tout à l’heure ?
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Par Jean-Paul Teyssier le 25 Mai 2022 à 15:58
Fatiguée l’écriture
de même que le corps entier
et bien plus :
l’écriture devient
la fatigue elle-même.
Comme fatigue elle n’entre pas.
Comme écriture
elle met en marche
le corps fatigué.
Mais ne le vois-tu pas ?
Il est marche, certes,
et bien plus,
immobile marche.
L’écriture l’étreint.
Ni l’un ni l’autre ne bouge,
elle prend la forme,
et tout l’être,
de la fatigue qu’elle est devenue.
Elle n’a pas d’existence
si ce n’est la fatigue,
qui l’emmène sur les terres de l’absence, du rien, du noir.
Là où le corps fatigué
est le sujet du poème.
Là où l’immobilité
lui fait deviner
l’obscurité
de chaque passage à la ligne.
Là où la page s’épuise
derrière l’inutilité
de ses visages.
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Par Jean-Paul Teyssier le 23 Janvier 2022 à 14:49
Bouton de rose
dressé tout en haut de sa longue tige
seul
parmi les arbustes dépouillés.
Dans le jardin de l’hiver
il attend l’éclosion
mais d’abord
le cri des plantes.
Lasses sous un ciel laiteux
patientes dans le froid
abandonnées
dans leur humilité
elles appellent.
Qui ?
Elles ne le savent pas.
Leur sève, dirait-on,
s’est retirée dans les racines.
Qui jamais connaîtra
leurs échanges souterrains ?
Quel mystère entoure
cette sève douloureuse
qui insiste
et d’une plante à l’autre passe ?
Débordant les saisons
entraînant les racines
transperçant dans ses profondeurs
la terre du jardin
la sève déchirante
a rejoint la souche
du bouton de rose.
Le cri
commence
à la naissance de la racine
s’élève
pousse dans le sol
se glisse dans la tige
atteint le bouton.
Dans sa petitesse
il est
le cri
il est
les plantes multiples
séparées
élevées en lui.
Il est
dans sa couleur
le hurlement sans cesse croissant
du jardin et de ses attentes.
Il est
dans la détresse des végétaux en hiver
leur printemps admirable.
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Par Jean-Paul Teyssier le 28 Octobre 2021 à 16:30
Chaque jour
accomplir les gestes :
mystère de paternité.
***
Chaque jour
choyer
les gestes ratés :
mystère de filiation.
***
Le courage
de commencer le geste,
puis
le laisser se poursuivre.
***
Grand geste inachevé :
objectif
de la lumière.
***
Suivre,
si besoin chercher,
les mouvements
de l’inachevé.
***
Inachevé :
repos lumineux.
***
Inachevé :
tendresse incluse.
***
Inachevé :
plénitude.
***
Le monde :
infini dans l’inachevé.
***
Inachevé :
la création aujourd’hui
à nouveau commencée.
***
Inachevé :
porte de l’immensité,
jardin de la tendresse.
***
Comment un jardin
peut-il donner
sur l’univers ?
***
Ouvrons
la porte cachée du jardin,
par elle
sortons
dans l’envers de la lumière.
***
Ne rejeter
aucune parcelle
de l’envers de la lumière.
***
Décision
d’explorer désormais
l’envers de la lumière.
***
Dans l’envers,
il y a les déchirures,
et il y a la lumière,
parce qu’elle émane
des déchirures.
***
Veiller sur la lumière,
que les déchirures soient
transparence.
***
Rendre les déchirures
transparentes.
***
Les rendre
à la maternité de la lumière.
***
Épouser la lumière
jusqu’à son obscurcissement.
***
Dans l’obscurcissement
tenir le regard
sur l’obscurci.
***
L’obscurcissement,
cadeau amoureux
de l’obscurci.
***
L’emporte
l’amour de l’obscurci :
nous saisit
une tendresse lumineuse.
***
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Par Jean-Paul Teyssier le 5 Octobre 2021 à 15:33
Mystère d’une fête :
la mort changée en lumière,
et larmes de tendresse.
***
Mystère de l’humilité :
croire en l’immensité,
où la tendresse
meurt dans la lumière.
***
Mystère de la maternité,
à qui la prière la plus folle
abandonne sa demande
et
se donne.
***
Donner le mystère,
pour qu’il soit
de la lumière.
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